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ANALYSE ECONOMIQUE ET SOCIALE DE 1996 A 1998 :
La Constitution révisée, adoptée en décembre
par l'Assemblée nationale, a été promulguée
le 18 janvier 1996. Création d'un conseil constitutionnel et d'une
deuxième Chambre parlementaire (Sénat), transformation des
provinces en régions dotées de la personnalité juridique,
responsabilité du gouvernement devant le Parlement et limitation
du mandat présidentiel à sept ans renouvelable une fois sont
les innovations majeures de ce texte. Mais l'introduction du concept d'autochtone
- art. 57-3: « Le Conseil régional est présidé
par une personnalité autochtone de la région » -, qui
reste à définir, laisse d'autant plus perplexe que le pays
est toujours traversé de courants fédéralistes et
indépendantistes chez les anglophones, et que des antagonismes
régionaux et ethniques s'expriment sporadiquement. Trois partis
dominent le paysage politique à l'issue des élections municipales
du 21janvier 1996. Globalement, le Rassemblement démocratique
du peuple Camerounais (RDPC, au pouvoir), marque un recul mais contrôle
tout de même plus de 50% des communes; il domine le centre et le
sud du pays et, un peu partout, les zones rurales. Le Social Democratic
Front (SDF, opposition) dirigé par l'anglophone John Fru Ndi, l'emporte
à l'ouest. L'union nationale pour la démocratie et le progrès
de Bello Bouba Maigari (UNDP; opposition), arrive en tête au nord.
Usant des possibilités offertes par un décret de 1993, Paul
Biya a nommé, le 27 février, des délégués
du gouvernement qui viennent coiffer les élus dans les principales
villes du pays, dont 8 conquises par l'opposition l'opération
est perçue par la population comme la confiscation du résultat
des urnes.
Les élections prévues en 1997, législatives en
mars et présidentielle en octobre, pour lesquelles l'Eglise catholique
locale et l'opposition réclament une commission électorale
indépendante, devraient donc mesurer la réalité de
la démocratisation camerounaise. Le changement de gouvernement consécutif
à la nomination, le 19 septembre, de Peter Mafany Musonge au poste
de premier ministre s'est inscrit dans la perspective de ces scrutins,
avec une représentation renforcée des deux provinces les
plus peuplées, le Centre et l'Extrême-Nord: neuf membres chacune
dans une équipe gouvernementale qui en compte 30. Anglophone comme
son prédécesseur, M. Musonge a notamment été
choisi pour son profil de gestionnaire et de technicien, à l'heure
où Yaoundé espère conclure des accords renforcés
avec le FMI en janvier 1997.
Régulièrement en effet, depuis septembre 1988, le Cameroun
s'adresse au FMI ; tout aussi régulièrement, l'accord est
bloqué pour cause de lenteur dans les réformes (privatisations,
réduction des effectifs de la fonction publique). C'est le cas aujourd'hui
du quatrième accord signé le 27 septembre 1995. Alors que
le FMI prévoyait une croissance économique de S % pour 1996,
une étude publiée fin mai par le Groupement interpatronal
du Cameroun (Gicam) indiquait que la croissance ne serait que de 3,4 %.
L'inflation devrait être circonscrite à 8 % sur l'exercice
95-96. La dette extérieure du pays est de plus de 4 000 milliards
de francs CFA en 1996 et la dette intérieure, dont le non-règlement
a entraîné la fermeture de nombreuses entreprises, s'élève,
selon le Gicam, à 1 000 milliards de francs CFA.
Le budget 1996-1997 adopté en juillet s'élève
à 1113 milliards de francs CFA; le service de la dette atteint 585
milliards de francs CFA.
Les relations entre Yaoundé et les institutions financières
internationales se sont normalisées au cours de 1997. Le 20 août,
un accord portant sur une facilité d'ajustement structurel renforcé
(FASR) de 219 millions de dollars (1,3 milliard francs) sur trois ans a
été signé, ce qui devrait desserrer l'étau
budgétaire qui paralysait le pays depuis le début de la crise
économique, il y a maintenant plus de dix ans. Le Club de Paris
a recommandé un allégement de 50 % de la dette publique.
Mais ces accords n'impliquent pas que la confiance soit tout à
fait revenue entre le Cameroun et les bailleurs de fonds. Le pays reste
sous haute surveillance. En 1996, la croissance économique
(5,3 %) a dépassé la croissance démographique,
pour la première fois depuis bien longtemps. Et l'inflation
est tombée au-dessous de 5 %, stoppant ainsi l'appauvrissement de
populations qui furent autrefois parmi les plus prospères d'Afrique
centrale.
Le gouvernement devrait tirer de nouvelles recettes de l'oléoduc
qui reliera le gisement de Doba, au sud ouest du Tchad, au terminal pétrolier
de Kribi. Les revenus de cet investissement sont estimés à
plus de 40 millions de dollars (240 millions de francs) par an. Dans les
autres domaines, les investisseurs étrangers ne se bousculent pas.
Le programme de privatisation progresse très lentement, en raison
d'un environnement juridique et judiciaire déstabilisant.
Sur le front politique, le président Paul Biya a obtenu à
la fois la majorité à l'Assemblée et sa réélection.
L'annonce du chiffre de la participation à la présidentielle
(plus de 90 % de votants, c'est-à-dire plus que lorsque l'opposition
a pris part au scrutin) a montré que le Rassemblement démocratique
du peuple camerounais (RDPC, l'ancien parti unique) en place était
avant tout résolu à maintenir son monopole sur l'Etat, quitte
à provoquer les populations qui ne lui sont pas acquises. Or l'opposition
est particulièrement bien implantée dans les régions
les plus dynamiques, à Douala par exemple, et le pouvoir n'hésite
pas à pratiquer des représailles économiques à
l'égard des villes ou des provinces qui votent mal.
En obtenant la première place au classement des pays les plus
corrompus établi par une ONG anglo-saxonne, le Cameroun n'a guère
amélioré son image de marque. Quelle que soit l'approximation
qui préside à la confection de ce genre de tableau de déshonneur,
un fait demeure: les lois qui président aux activités économiques
au Cameroun sont à la fois compliquées et incertaines, et
les séquelles de la longue régression des années 80
se font encore durement sentir
Mais le pays reste un flot de stabilité relative dans une Afrique
centrale francophone ruinée par les guerres civiles congolaises
et les mutineries centrafricaines. Il reste la porte d'entrée obligée
des produits destinés aux pays enclavés (Tchad,RCA), et son
potentiel agricole est immense. L'absence de violences lors des élections
de 1996 et a 1997, malgré les conditions très contestables
d'organisation, a rassuré les institutions financières internationales,
qui ont renoué avec le Cameroun tout en imposant des conditions
drastiques à chaque projet C'est qu'il y a urgence: par rapport
au niveau de l'activité économique, les infrastructures,
particulièrement dans le domaine des routes et des télécommunications
- sont insuffisantes, et il faut rompre avec une politique d'aménagement
du territoire qui relevait plus de la sanction ou de la récompense
électorale ou militante que de la logique économique. La
réalisation, prévue pour l'an 2000, du pipeline reliant les
champs pétrolifères du sud du Tchad au port de Kribi devrait,
grâce à la redevance versée par une société
dont l'Etat camerounais sera actionnaire,
augmenter notablement les ressources de l'Etat
Le programme de privatisations est très lent à se mettre
en route, en raison des réticences des dirigeants du secteur public,
qui voudraient conserver leurs avantages, parfois colossaux, mais aussi
à cause des inquiétudes des investisseurs, qui savent que
le pays reste l'un des champions de l'insécurité juridique.
Parmi les cultures de rente, seul
le coton échappe au déclin, alors que le cacao et le
café ne se sont pas remis
d'une libéralisation mal menée. Malgré ces tribulations,
l'économie a crû en 1998 d'environ 5 %, preuve du dynamisme
des entrepreneurs locaux.
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